Les chiffres clés sur les femmes et la tech
Les femmes sont sous-représentées dans le domaine du numérique. Découvrez les chiffres clés et l'histoire des femmes et de la tech.
Une sous-représentation des femmes dans le domaine du numérique
En 2023, la présence des femmes dans le secteur du numérique en France reste faible mais montre une légère progression. Selon l'INSEE, les femmes occupent 24 % des emplois dans les professions numériques, un pourcentage qui est resté relativement stable ces dernières années.
Les femmes dans le numérique sont plus diplômées par rapport à d'autres secteurs : 70 % d’entre elles possèdent un diplôme d’enseignement supérieur long, contre seulement 33 % dans d’autres secteurs. Malgré ce haut niveau de qualification, elles ont généralement moins d’expérience, avec 58 % d’entre elles ayant moins de cinq ans d’ancienneté.
D'après une enquête réalisée par l'association Elles bougent en septembre 2024, seulement un quart des ingénieurs en activité sont des femmes.
Bien que la proportion de cadres parmi les femmes dans le numérique soit supérieure à la moyenne, elle reste inférieure à celle des hommes, avec seulement 62 % des femmes occupant des postes de cadre, contre 70 % pour les hommes.
En Europe, la proportion de femmes spécialistes des TIC a légèrement augmenté, passant à environ 25 % en 2023, mais elle reste bien en deçà de la parité.
Des disparités dans les choix d'orientation
D'après le dernier baromètre GenderScan paru en février 2024, plus d'une étudiante sur trois dans le secteur des technologies et du numérique a été découragée de faire ce choix, avec un écart femmes/hommes significatif. En effet, dans le numérique deux fois plus d’apprenantes que d’apprenants déclarent avoir été découragées, notamment pour le motif qu'il ne s'agirait pas de « métiers de femmes » (pour 33% d'entre elles). Cela montre que les stéréotypes ont la vie dure !
D'après une enquête menée en 2021 par l’école informatique Epitech et Ipsos, qui analysait les choix d’orientation des jeunes en fonction de leur genre, les stéréotypes des parents éloignent les filles des métiers du numérique. En effet, seulement 33% des filles sont encouragées par leurs parents à s’orienter vers les métiers du numérique, contre 61% des garçons, alors que les parents sont les principaux prescripteurs en matière d'orientation.
Cette même étude montre que 37% des lycéennes envisagent de s’orienter vers une école d’informatique ou une école d’ingénieur, contre 66% des garçons. Pourtant, 56% des lycéennes sont intéressées par l’informatique / le numérique !
Le cas des startups tech
De plus, les femmes se heurtent à des barrières lorsqu'elles lancent leur start-up comme le révèle le baromètre réalisé par Sista et Boston Consulting Group (BCG) et publié en mars 2022 : en 2021, un homme lève 1,6 fois plus de fonds et une femme 3,4 fois plus en s'alliant avec un homme plutôt qu'avec une femme, d'après l'enquête. Par ailleurs, l'étude révèle qu'aucune levée de fonds au-dessus de 50 millions d’euros n’a été effectuée par une équipe 100% féminine cette même année. Ces équipes sont de manière générale 4,3 fois moins bien financées que les équipes masculines. La tendance s’aggrave depuis 2019 où l’écart n’était que de 2,4.
Toutefois, l'enquête de Sista et du BCG montre que les femmes sont de mieux en mieux représentées parmi les fondateurs de startups en France depuis 2019 (+9 points). De plus, les équipes mixtes sont les grandes gagnantes des levées de fonds : elles ont 1,4 fois plus de chance d’être financées dans les premiers tours de financement que les équipes 100% masculines.
Selon une autre étude menée par BCG : les startups co-fondées par des femmes ont un meilleur rendement. Pour un dollar investi, les fonds récupéraient 0,78 centimes pour une startup féminine contre 0,32 centimes pour une startup masculine.
Il est donc nécessaire d'agir et de s'engager pour réduire ces inégalités, d'autant plus que cette sous-représentation des femmes dans le secteur numérique est un fait récent : en effet, les femmes ont été pionnières dans le secteur de la Tech.
Les femmes et la Tech : une vielle et belle histoire
Elles s’appellent Ada Lovelace, Grace Hopper, Hedi Lamar, Mary Keller, Margaret Hamilton, etc. ce sont toutes des pionnières de l’Internet et de la Tech en général.
Commençons par Ada Lovelace qui a créé le premier programme informatique en 1843. Elle a réalisé les premières ébauches d'une écriture formelle des instructions à employer avec une machine analytique pour réaliser des calculs donnés. Fille du poète britannique (lord Byron) et d'une mathématicienne (Anne Isabella Milbanke), Ada Lovelace a collaboré avec le mathématicien Charles Babbage, inventeur d’un système mécanique considéré comme le précurseur des ordinateurs.
Passons à Hedy Lamarr actrice, productrice de cinéma qui a joué avec les plus grands réalisateurs King Vidor, Victor Fleming, Cecil B. DeMille, etc. Mais outre sa carrière réussie au cinéma, elle a marqué l'histoire scientifique car Hedy Lamarr est aussi inventrice. Elle a déposé en 1941 un brevet pour sécuriser les télécommunications, toujours en usage dans les liaisons wifi et bluetooth.
En 1945, Kay McNulty, Betty Jenning, Betty Snyder, Marlyn Meltzer, Fran Bilas, Ruth Lichterman, surnommées les «ENIAC six», ont été les premières à programmer l’ENIAC, l’un des premiers ordinateurs de l’histoire. L'ENIAC est l'acronyme de l'expression anglaise Electronic Numerical Integrator And Computer – Ordinateur et Intégrateur numérique électronique.
Quant à Grace Hopper, elle a imaginé la notion de «compilateur» en développant le premier modèle d’ordinateur en 1952. Elle a ainsi créé le premier compilateur, un programme capable d’associer un code source et un langage plus accessible pour les développeurs.
Mary Keller, elle, soutient la première thèse en informatique. Alors que les femmes n'avaient pas le droit d'accéder aux centres informatiques, elle participe au développement du BASIC et obtient un doctorat en 1965.
Margaret Hamilton, cette informaticienne, à qui on doit le terme de « software engineering », mais surtout c’est elle qui conçut le système embarqué du programme spatial de la mission Apollo 11 au cours de laquelle, pour la première fois, des hommes se sont posés sur la Lune, le 21 juillet 1969.
Comme on le voit du 19e siècle jusqu'après la Seconde Guerre mondiale, la programmation est essentiellement effectuée par des femmes. Dans les années 50, la moitié des effectifs du secteur informatique sont des femmes. Les femmes resteront d’ailleurs majoritaires jusqu’à dans les années 70. Dans les années 80, 40 % des diplômes informatiques étaient délivrés à des femmes en Europe et aux Etats-Unis.
Dans les années 1990, deux phénomènes sont déterminants dans la chute du nombre des femmes dans les filières numériques :
- La montée en puissance de l’informatique qui est devenue un enjeu stratégique pour les entreprises et les Etats. Elle a ainsi gagné en prestige et les hommes s’y sont engouffrés en masse au détriment des femmes.
- L’apparition des ordinateurs individuels a permis d’équiper quasi exclusivement des hommes (les pères et leurs fils) au sein des foyers.
Or l’histoire démontre que lorsqu’un champ de savoir prend de l’importance dans le monde social, il se masculinise. A ce sujet, découvrez le livre très intéressant Les oubliées du numérique de Isabelle Collet, informaticienne, enseignante-chercheuse à l'université de Genève.
Trois exemples de métiers qui ont suivi cette évolution :
Dans les années 1980-1990, lorsqu’on parlait de sécurité informatique, on retrouvait 20 % de femmes qui travaillait dans ce domaine. En 2020, on parle désormais de cybersécurité, enjeu stratégique, le résultat est que seules 11% de femmes travaillent dans ce domaine.
En 1990, le métier «d’employé et d’opérateur de l’informatique» était ainsi surtout composé de femmes opératrices de saisie, ensuite ces postes sont devenus des « postes d’opérateurs d’exploitation en informatique », bien plus qualifiés et gagnent en importance, ils sont donc désormais principalement occupés par des hommes.
Jusqu’en 1960, les « postes de codages » des ordinateurs étaient ainsi presque exclusivement féminins en Grande-Bretagne. En 1965, aux États-Unis, on trouve 30 % de femmes en programmation. En 1982, 35 % des emplois d’informaticiens en France sont occupés par des femmes. Aujourd’hui l’importance du traitement et de l’analyse des données et l’avènement de l’intelligence artificielle font que seulement 12 % de femmes travaillent dans ce secteur en France.
Comment favoriser la mixité dans le numérique ?
La sous-représentation des femmes dans le secteur du numérique représente une régression sociétale porteuse d’inégalités et elle a un coût économique.
Aujourd’hui, le secteur numérique est l’un des moteurs de l’économie, avec des entreprises qui connaissent des croissances importantes et transforment la société. C’est le secteur qui générera le plus de nouveaux emplois dans les années à venir : l’emploi dans le numérique progresse 2,5 fois plus vite que dans les autres secteurs. En exclure les femmes est dommageable, car cela les priverait d’opportunités d’emploi dans un secteur en forte croissance, aux statuts plus stables, aux perspectives de carrières prestigieuses et fortement rémunérées.
De même, d’un point de vue économique, selon la Commission Européenne, si les femmes occupaient autant d’emplois que les hommes dans le numérique, il s’ensuivrait un gain d’environ 9 milliards d’euros par an pour le PIB européen.
Quant à la France, la parité dans le numérique générerait 10% de PIB supplémentaire d’ici à 2025 selon une étude de McKinsey.